Il était une fois...

[Clotho]

Suite de De drôles de souvenirs

Enfin, elle avait fini cette traduction. Elle s'y était vouée des jours durant, ne vivant plus que par les mots qu'elle transcrivait avec fébrilité et passion, portée par cette vie qui n'était pas la sienne. Ce Khan était devenu comme un vieil ami pour elle.

A peine eut-elle achevé d'écrire le dernier mot qu'elle relia grossièrement les feuilles où reposait le texte en asmodien classique et qu'elle quitta son bureau, désireuse de remettre son travail à la Louve, tout en lui dévoilant les passages les plus surprenants de ce journal.

Elle fila jusqu'au Refuge, serrant contre sa poitrine le carnet et sa transcription et frappa sans attendre à la porte de l'office de la Louve, son cœur battant à tout rompre.

[Inuzuka Kiba]

Kiba était assis dans le grand fauteuil de la Louve, cette dernière se tenait sur ses cuisses, se reposait la tête appuyée contre le torse de son loup, satisfaite et comblée par ce mâle, par son mâle. L’enfant loup savourait ce moment de tranquillité, tranchant totalement de la fougue et de l’allégresse qui envahissaient l’office quelques instants auparavant.

Ce moment de quiétude fut brusquement interrompu par un tambourinage pressant sur la porte du bureau. Kiba ouvrit les yeux et ses narines vibrèrent à la recherche de l’impudent qui osait briser leur repos. Il reconnu directement l’odeur de Dame Clotho… Il aurait voulu ne rien faire, l’ignorer la laisser repartir mais elle avait surement quelque chose d’important à dire pour frapper ainsi. Saraban émergea lentement de son sommeil, papillonnant des yeux.

« Clotho est là… »

Lui souffla-t-il, déposant un bisou sur ses lèvres tout en se redressant. Ses mains soutenant sa louve il la déposa sur le rebord de la grande table et écartant son corps il rompit leur union, extrayant sa chair de son corps.

La porte vibra une seconde fois sous les coups de la Cerbère du Message.

«Un instant Clotho »

Grogna le jeune daeva. Tout en se dirigeant vers la fenêtre qu’il ouvrit grand pour aérer le bureau. Se retournant pour ramasser son keikogi, un sourire traversa son visage à la vue du désordre dominant la pièce ; livres renversés, feuilles éparses, lutrins au sol... Ils s’étaient donnés sans retenue, comme à chaque fois…

D’un mouvement rapide il enfila le pantalon de son kimono et aida sa louve à remettre sa tenue… ou du moins ce qu’il en restait. Il haussa les épaule et décrocha son sourire canin en réponse au regard sombre de sa louve quand à l’état de son chemisier… Après quoi il se laissa tomber dans un des fauteuils faisant face au bureau et fixa sa louve d’un regard on ne peut plus fier. Laissant son index courir sur le haut de son épaule droite. Il s’amusait de voir que la tenue de sa louve ne recouvrait absolument plus la marque qu’il venait de ré-apposer dans son cou.

[Saraban]

Flegmatique, blasée et calme. Qu'est-ce qu'elle aurait pu faire de toutes façons ? Ca n'était pas la première fois et ça ne serait probablement pas la dernière que quelqu'un frapperait à son bureau alors que Kiba était « avec » elle. Encore que là Saraban se dit qu'elle avait un peu de chance dans son malheur, Clotho était arrivée après et puis surtout c'était de la courtisane qu'on parlait. Elle aurait probablement été un poil plus gênée si ça avait été Synae derrière la porte.

Elle soupira, remit comme elle le put son chemisier désormais ouvert jusqu'à la naissance de sa poitrine et ouvrit doucement la porte, ignorant superbement le jeune homme avachit dans un fauteuil derrière.

Bonjour Clot- La jeune femme avisa en quelques secondes le carnet relié que son Message tenait contre son coeur et elle embraya sans même finir ses salutations- Tu as terminé ? Demanda prestement la Louve le regard soudain illuminé de curiosité.

[Clotho]

La situation, naturellement, amusa la daeva de l'amour. Cela la poursuivait loin, très loin. Aussi ne put-elle réprimer un sourire un peu narquois. Combien de fois ce genre de choses lui était-il arrivé à elle-même ? Elle ne les comptait plus... D'ailleurs, un instant, ses pensées se tournèrent vers un amant qui la troublait plus que de mesure et elle se mit à frémir. Aion en soit remercié, Saraban ouvrit finalement la porte et l'extirpa de cette rêverie gênante :

"Hm... Je dérange, peut-être ?", demanda-t-elle, soucieuse des questions de politesse.

Elle relâcha un peu son étreinte sur le carnet et l'agita sous le nez de la Louve, éventail dépareillé.

"C'est fini. Si tu veux je te laisse ça et tu le regarderas quand tu seras plus... disposée ?"

Elle adressa un clin d'oeil mutin à la Louve, lui tendant le carnet et la traduction qui allait avec.

[Saraban]

Saraban arbora une moue boudeuse un instant et se saisit du carnet que la courtisane agitait devant elle. Pas une once de honte ne la traversa et elle agissait de la façon la plus naturelle du monde, si on oubliait son chemisier qu'elle remontait parfois.

Merci.

Avec fébrilité mais précaution elle ouvrit le carnet de pages reliées et le parcouru rapidement des yeux, s'arrêtant parfois sur une page précise avant de reprendre. Ce petit jeu dura une minute tout au plus avant qu'elle ne redresse la tête.

Je vais le regarder tout de suite en fait. Tu veux rester avec moi... En bas ? Finit-elle par dire en s'adressant à Clotho, tournant légèrement la tête pour apercevoir la masse chevelue sombre qui dépassait du fauteuil. Tu as pu en tirer quelque chose d'intéressant ? Ca parle de quoi ?

[Inuzuka Kiba]

« Entrez donc Dame Clotho, vous serez très bien ici pour discuter de ces écrits, vous ne vous apercevrez même pas que je suis là. »

Il se leva et ramassa quelques feuilles au sol qu’il reclassa dans le bon ordre et le bon sens.

« Je vais faire quelque rangement, ce bureau est dans véritable capharnaüm à chaque fois que j’y passe. Un désordre que je ne reconnais pas à Ma Louve. »

Ajouta-t-il avec un large sourire sur un ton amusé et des plus amical. Ne prêtant aucune attention aux traces de griffes et de morsures très récentes qui lacéraient son torse et son cou.

« Prenez donc place. Je vous apporte du thé et des petits gâteaux maisons ?»

Fit l’enfant loup en désignant un des sièges.

[Clotho]

Elle regarda Kiba faire d'un air taquin.

"Bien, bien... Visiblement ça sera en haut", dit-elle à Saraban d'un ton rieur et elle alla s'asseoir sur le siège qu'il lui indiquait avant de répondre à celle-ci, "ce carnet est en fait le journal intime d'un élyséen, il y a consigné toute son existence jusqu'au jour où il a présentement égaré celui-ci", elle marqua une petite pause, guettant la réaction de la Louve puis reprit, "Tu te demandes sûrement comment cet objet a pu passer de ce côté d'Atréia. La réponse est dans les dernières pages qui sont certainement les plus surprenantes."

Dernières pages qui éveillaient en elle un ancien souvenir... Un terrible secret qu'elle ne devait révéler à aucun prix, même à la Louve. Son regard s'assombrit : qu'elle haïssait ces silences forcés qui ressurgissaient et qui pouvaient la mettre en danger...

[Saraban]

Saraban referma derrière Clotho et alla s'installa en face d'elle, dans son fauteuil, faisant crisser le cuir alors qu'elle s'y laisser mollement tomber. Elle fit une pile asymétrique des divers papiers éparpillés sur son bureau pour laisser la place à son Message d'y poser le carnet pendant que Kiba se chargeait de ce qui trainait encore au sol.
Elle se pencha sur son bureau, le nez au-dessus des pages pendant que la courtisane lui faisait part de quelques explications. Sa tête se releva lorsqu'elle eut finit de parler, un air curieux, avide, collé au visage.

Qu'est-ce qu'elles disent ces dernières pages alors ? Il s'appelle comment ce type ? Et ça raconte quoi en fait ? Je veux bien que sa vie soit intéressante mais y a forcément des trucs plus utiles que d'autres dedans non ? Je suis pas sûre que savoir qu'il aime la palourde au curry soit d'un grand intérêt...

Le visage de Clotho se crispa un instant alors qu'elle semblait dans ses pensées, n'osant pas la déranger, attendant qu'elle reprenne la parole, elle préféra se taire, laissant ses questions en suspend.

[Clotho]

"Khan... C'est un soldat de l'armée élyséenne. Tout l'intérêt se trouve dans ces dernières pages. Il y raconte une expédition en Asmodae qui a pris une tournure assez particulière puisqu'une partie des hommes du convoi s'est retournée contre l'autre lorsqu'il s'est agi d'attaquer un innocent village. Khan était de ceux qui s'opposaient à cet inutile massacre. Suite à cela, il semblerait qu'il soit devenu un paria... Puis il a du égarer son journal."

Elle semblait toujours troublée. Au fond, à quoi pouvait servir cette vieille histoire ? Elle ne mettait rien en jeu, rien qui puisse justifier qu'elle livre un dangereux secret... Mais, en même temps, s'il y avaient sur Atréia des gens qui avaient le droit de tout savoir d'elle, n'étaient-ils pas sur cette île ? Son affranchissement devait-il passer par là ? Ceci lui échappa, en un murmure fébrile, d'un ton tremblant :

"Le plus étrange, c'est que... J'étais dans ce village lorsque cela s'est produit."

[Saraban]

Saraban l'écouta attentivement, buvant chacun de ses paroles. L'histoire pouvait être intéressante, elle avait toujours pensé fermement que les réactions qu'avaient parfois les Asmodéens devaient être identiques chez les Elyséens. Beaucoup des suivants d'Asphel se plaignaient de la violence de ceux aux plumes blanches, mais elle était persuadée que ceux de son peuple savaient se montrer aussi cruels voire peut-être plus si ce qu'elle croyait à propos du donjon d'Altgard se révélait exact.

Ceux qui se rebellaient n'était finalement qu'une petite goutte d'eau dans une mare de démence.

La jeune femme se pris à sourire... Elle aimait l'idée que ce reliquat fait d'encre et de papier ait échoué sur leur île, comme une invitation, en ces jours où elle avait du mal à croire, à poursuivre sur la voie de La Cohorte.

Son sourcil droit se haussa légèrement lorsqu'elle perçut le murmure de Clotho, d'un regard brillant elle dévisagea son Message, lui posant une question muette avant de finalement s'exprimer à voix haute.

Tu me racontes ça ?

D'une main elle feuilletait les notes de la sorcière, attendant que celle-ci lui réponde.